La honte

Publié le par Corn-Flakes

Ce texte est inspiré de "La honte" de eglantine et qui est disponible en cliquant sur cette phrase.



_ Vous vous foutez de moi ?

L'institutrice me regardait sévèrement derrière ses épaisses lunettes. Je pouvais sentir son regard glacé se poser sur moi avec un mépris non dissimulé.

_ Vous vous foutez de moi ?

Elle répéta cette phrase à moins de quelques centimètres de mon visage. Je pouvais sentir son haleine empestant le café. Des postillons venaient s'écraser sur ma table, et sur le coup, je ne sus rien faire d'autre que de rester là, la tête basse, à réfléchir à ce que j'avais pu faire pour la mettre dans cet état. J'avais camouflé l'odeur de la cigarette, mes devoirs étaient en ordre, je n'avais strictement rien à me reprocher.

_ Vous vous foutez de moi ?

Désormais, elle agitait une feuille en papier devant mon nez, toujours en me fusillant du regard, comme si je comprenais quoique ce soit. Cette feuille en question, c'était ma rédaction, et j'avais écris quelque chose de superbe. Peut être pensait-elle justement que j'avais plagié outrageusement un autre auteur.


_ Je vous assure madame, c'est bien moi qui ai écrit ça.

J'avais prononcé ses paroles, toujours la tête basse. La seule chose que je voyais, c'était le parquet rayé de la salle de classe et mes chaussures pleines de boue. Il semblait ne plus y avoir un seul bruit dans la classe, et j'imaginais aisément les élèves regarder la scène, le souffle coupé de peur de se faire engueuler à leurs tours. Et bien soit, qu'ils tremblent, moi je n'avais rien à me reprocher, je savais parfaitement que j'étais l'auteur de ma rédaction, et je n'avais donc aucune raison de rester la tête baissée et subir la colère de mon professeur. En relevant les yeux vers mon institutrice, je la vis dans une colère indicible. Elle était toujours debout en face de moi, mais son visage austère semblait crisper, comme si elle retenait intérieurement sa colère. La première comparaison me venant à l'esprit fut celle d'une bouilloire qui chauffe petit à petit, puis bouillonne et se met à siffler, à siffler de plus en plus fort jusqu'à vous exploser les tympans. Ou jusqu'à exploser tout court, en fait. Et c'est exactement ce qui est arrivé à mon institutrice. Elle a explosé. Pas au sens propre évidemment, elle n'a pas répandu des lambeaux de chairs sur les visages chérubins des élèves. Non, elle a explosé en criant d'une voix stridente une phrase que je n'aurais pas compris si elle ne l'avait pas prononcée trois fois avant :

_ Vous vous foutez de moi ?


Hors d'elle, l'institutrice retourna à son bureau et jeta ma copie dessus, sans état d'âme. J'avais la gorge serrée et le ventre noué. Même si je ne savais pas pourquoi, j'allais passer un sale quart d'heure.

_ Monsieur, bien que cette rédaction soit très bien écrite et qu'il n'y ait aucune faute, vous aurez zéro, car vous avez menti par vanité.

Elle semblait s'être légèrement calmé. Disons du moins qu'elle ne me criait plus dessus, elle ne faisait qu'élever la voix en lui donnant un air supérieur et dédaigneux désormais. J'ai menti ? Certes de nombreuses fois, mais rien de bien exceptionnel pour un enfant de mon âge, mais quel est le rapport avec ma rédaction ? Celle-ci avait pour sujet : « Racontez votre dernier Noël ». Et comme il avait été particulièrement joyeux, je n'eus aucun mal à ressentir ce que j'avais vécu et ressenti. En effet, ce Noël ci était exceptionnel puisque mes parents et moi-même avons passer un séjour au ski. J'ai déballé mes cadeaux dans un grand chalet loué pour ce séjour et j'ai eu l'agréable surprise d'obtenir en plus une console de jeux vidéo de la toute dernière génération. Ce fut pour moi un moment tout ce qu'il y a de plus magique, et je pense avoir retranscrit cela à merveille dans ma rédaction. Mais l'institutrice pensait que j'avais menti. Pour quelles raisons ?


_ Vous devriez avoir honte de raconter de telles inepties, avouez que vous avez menti. Comment voulez-vous que vos parents qui sont pauvres et ne peuvent payer votre scolarité puissent avoir les moyens de s'offrir un séjour au ski, et en plus de vous gâter au plus haut point ?

C'était donc ça qu'elle désirait depuis le début, m'humilier en public. Ses dires m'avaient transpercé aussi sûrement qu'une lame. J'étais abasourdi devant une telle haine et mes yeux bouillonnaient non seulement de larmes, mais aussi de rage. Cette fois, c'était moi la bouilloire. Cette fois, c'était moi qui était sur le point d'éclater. J'entendis des rires moqueurs derrière moi. Le visage de mon institutrice était éclairé d'un rare sourire. Elle devait être heureuse de m'avoir ainsi abaissé. Oh oui, elle devait se sentir supérieure. Elle devait se sentir invulnérable et toute puissante. C'était facile de s'en prendre ainsi à un garçon de mon âge, trop facile. Ma main se crispait contre mon stylo-plume, mes oreilles sifflaient, la rage bouillonnante était sur le point d'exploser, je n'allais certainement pas me laisser humilier ainsi.


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E
Mon texte t'as vraiment bien inspiré. Le plus drôle dans cette histoire vraie c'est que j'allais au ski aussi en colonie mais heureusement que je n'ai pas raconté cela aussi dans ma rédac sinon en plus de menteuse je devenais mytho.... Je ne te souhaite pas une bonne année, j'ai lu ton autre article... A bientôt
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C
<br /> Merci. J'espère te revoir à l'occassion. :)<br /> <br /> <br />
S
Bonsoir,Je souhaite une excellente année et une longue vie dans la blogosphère à tous les membres de ma communauté cinéphile !Amicalement,Shin.
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D
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G
Hello,Un bon réveillon à toi en ce 31 décembre !Bye, bye !!!
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D
 Mes voeux sont sur mon blog, mais ce n'est pas gagné...Passes un bon réveillon, et que cette nouvelle année te soit douce.Bisous
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